logo-theatre-du-public-74J’ai interpellé ce jeudi 28 janvier la Ministre de la Culture, Joelle Milquet, sur la situation préoccupante vécue par l’équipe du Théâtre du Public, un théâtre qui se situe au carrefour de l’animation, de la création théâtrale et de l’éducation citoyenne. Vous lirez ci-dessous le texte de mon interpellation ainsi que la réponse de la Ministre. Beaucoup d’acteurs culturels se retrouvent dans des situations critiques en raison des décisions budgétaires prises par les Gouvernements régionaux mais aussi ceux de la Fédération Wallonie-Bruxelles et du Fédéral.

M. Christos Doulkeridis (ECOLO). – Le théâtre action occupe une place particulière dans le paysage culturel belge. Au regard de l’affaire Charlie Hebdo, il est évident que le théâtre action est un moyen important pour toucher et sensibiliser le public. Il se situe au carrefour de l’animation, de la création théâtrale et de l’éducation citoyenne. Né des luttes ouvrières, il a évolué au gré des changements sociaux. Il faut le soutenir car c’est un facteur de développement d’une culture participative. Il fait réellement partie des spécificités et des forces de notre paysage théâtral et répond à une philosophie chère à mon groupe. Le théâtre du Public est conventionné par la Fédération Wallonie-Bruxelles. La volonté d’Actiris de supprimer un des deux postes permanents (un ACS, un APE) de la Compagnie, la met en danger. Cette intention fait suite à un rapport de l’inspection auquel l’association n’a pas eu accès. La suppression de ce poste mettrait fin à toutes les activités de la compagnie à Bruxelles. D’après les dernières informations dont je dispose, le dossier a été transmis au ministre bruxellois de l’Emploi qui, sur la base du rapport d’Actiris, devra prendre une décision. Outre son activité culturelle, il faut savoir que cette compagnie génère un grand nombre d’emplois, notamment artistiques. En 2014, elle comptait huit emplois d’artistes ou de techniciens du spectacle à Bruxelles et deux emplois artistiques et de production, en Région wallonne. Comme je l’ai déjà mentionné lors d’une discussion budgétaire, ce cas reflète la situation d’autres organismes culturels qui souffrent de la diminution de leurs subventions et de l’impact des décisions régionales sur les APE et les ACS. Avez-vous pris connaissance de la situation du Théâtre du Public? Quelle est votre position à et quels sont les moyens d’action susceptibles de débloquer la situation? De manière plus générale, comment évoluent les contacts sur les aides à l’emploi dans le secteur culturel?

Mme Joëlle Milquet, vice-présidente et ministre de l’Éducation, de la Culture et de l’Enfance. – Comme vous, c’est l’ancien directeur du théâtre du Public, devenu au 1e janvier le président de l’asbl, qui nous a alertée. Ce matin, le ministre régional Didier Gosuin a été informé des conséquences désastreuses de cette décision éventuelle. Pour un opérateur culturel, perdre l’un de ces deux postes subsidiés, signifie presque automatiquement la fin de l’association. Depuis 30 ans, le Théâtre du Public propose une programmation engagée qui sensibilise le public et le rend acteur de sa propre vie. Il est situé en Région bruxelloise et en Région wallonne; sa notoriété dépasse les frontières de notre pays; il est connu en tant que spécialiste du théâtre forum en France, en Palestine, au Burkina-Faso. Cette pratique encourage la réflexion critique. Ce théâtre au projet spécifique a toute sa place dans notre société. Lors du renouvellement du contrat-programme en 2013, l’avis du Conseil de l’art dramatique était très positif. Une nouvelle convention a été signée pour la période 2013-2016 qui comprend une subvention de 64 mille euros par an. La Compagnie emploie huit artistes ou techniciens du spectacle sous contrat ACS. En Région wallonne, elle occupe deux emplois artistiques et de production. Enfin, le Théâtre du Public dispose de deux postes permanents : un APE et un ACS TCT. En octobre dernier, le directeur a annoncé à Actiris qu’il prendrait sa retraite le 31 décembre et qu’une personne était pressentie pour le remplacer. Celle-ci remplit les conditions exigées par Actiris. Néanmoins, un inspecteur a invoqué des manquements dans le chef de l’association et fait bloquer le dossier. Récemment, un avis négatif a été remis au ministre Gosuin. Nous pouvons décider ne pas suivre cet avis. Le contenu du dossier de l’inspecteur n’ayant pas été communiqué à l’opérateur, il a peu d’éléments pour se défendre. À ma connaissance, le poste ACS ne se justifierait pas car on reproche à l’opérateur un manque d’activités à Bruxelles. Or, quand on examine les rapports d’activité, on constate que de 2012 à 2014, 80 pour cent du temps de travail du poste ACS a été effectué à Bruxelles. Le bureau de Bruxelles donne à la compagnie une attache concrète et effective dans une région qui est celle de son directeur et de ses artistes. Je reprendrai contact aujourd’hui avec M. Gosuin. Pour les ACS, je ne peux que remettre un avis. Même s’il est positif, je n’ai pas la main sur la décision.

M. Christos Doulkeridis (ECOLO). – Si je comprends bien, l’avis de la Fédération était positif en 2013, ce qui a conduit à une convention. Par ailleurs, malgré la critique du manque d’activités à Bruxelles émise dans le rapport de l’inspecteur attaché aux postes ACS et à la politique de l’emploi en Région bruxelloise, vous confirmez que 80 pour cent des activités ont lieu à Bruxelles, ce qui contredit le rapport.

Mme Joëlle Milquet, vice-présidente et ministre de l’Education, de la Culture et de l’Enfance. – Cela provient des informations dont je dispose, je ne suis pas une inspectrice!

M. Christos Doulkeridis (ECOLO). – Vous confirmez également que le rapport n’a pas été contradictoire et n’a pas laissé la possibilité à l’association de réagir au contenu de l’accord.

Mme Joëlle Milquet, vice-présidente et ministre de l’Education, de la Culture et de l’Enfance. – Je rappelle que ce n’est pas un avis conforme.

M. Christos Doulkeridis (ECOLO). – Le contact avec M. Gosuin est important, cela l’éclairera sur les activités organisées par ce théâtre. Il n’est pas anormal que des gens subsidiés comme ACS ou APE qui travaillent sur le territoire de la Fédération Wallonie-Bruxelles puissent le faire ailleurs. Nous devons être cohérents et maintenir la solidarité entre les deux Régions pour soutenir ces acteurs. J’espère que vos contacts permettront à ce théâtre de poursuivre ses activités dans les meilleures conditions, sans devoir arrêter brutalement si l’avis de l’inspecteur était suivi par le ministre.